CRITIQUES

La vieille dame (elle est née en 1916) continue son chemin d'écriture et de vie, malgré les épreuves. C'est ici au tilleul et du tilleul qu'elle parle.
Il remplit ce petit mais riche recueil, cet arbre déjà évoqué dans La pierre, l'arbre, l'âne, éd. l'épi de seigle. Il est le confident, l'ami des peines et des rires, presque aussi vieux qu'elle :
Petit frère sais-tu l'âge que tu as ?
quatre-vingts !
On t'a planté j'en avais dix
et tu en avais bien déjà trois.
Il y a chez Clod'Aria une attention aux moindres petites choses qui font la vie
Tu es comme moi : immobile
nous ne bougeons guère que les doigts
c'est assez pour nous faire signe...
tant celle-ci fut pleine de rencontres, de bonheurs, de chagrins. Les dessins de Claudine Goux, la complice, font de ce recueil une oeuvre à quatre mains. L'utilisation du texte manuscrit rend ces tranches de vie plus proches encore de nous. Nous aussi, nous nous sommes reposés à l'ombre de ce tilleul, nous avons caché notre visage rougi dans son ombre.
Décol'

Un très beau livre à la couverture blanche avec son tilleul aux verts multiples et son oiseau. Dès la première page le lecteur est fixé sur l'âge des protagonistes : 80 pour le tilleul et un peu plus pour l'auteur. Ainsi commence un émouvant monologue adressé à ce vieil arbre. Défilent des souvenirs… Des questions… Des mots…
Nous menons des vies parallèles
Je gribouille sur mes feuilles blanches
Et toi peut-être sur tes feuilles vertes
Le ton est juste. L'humanité aussi. Et chacun pourra s'y reconnaître aujourd'hui ou demain…
Qui n'a pas pleuré contre un arbre un jour ? Qui n'a pas ri sous ou dans un arbre ?
Signaler encore l'écriture manuscrite du livre. Qui ajoute à la sincérité du texte. Les couleurs et le trait de crayon. Bref, un livre à écouter autant qu'à voir.
Patrick Joquel

Poète âgée de 88 ans, Clod'Aria entame un monologue avec son ami d'enfance, son confident : un tilleul planté peu de temps après sa naissance, témoin de sa vie émotionnelle et familiale.
Au fil des saisons l'arbre se transforme, amputé de ses branches il rejoint la vieillesse.
L'immobilité rapproche ces deux êtres, pour conjurer le sort la parole vibre "L'arbre parle au vent et le vent multiplie les paroles de l'arbre". Le poète exorcise la douleur et la solitude grâce à sa création, composant une musique de mots sur des feuilles blanches. L'arbre, tout comme le poème, survivra au temps si personne ne le détruit.
Derrière une écriture cursive ramenant à l'intime, l'auteur nous plonge dans la philosophie de l'existence, revivant son passé avec le regard d'un sage.
Les dessins de Claudine Goux, en noir et blanc ou en couleur, aspirent parfois le texte donnant naissance à des calligrammes, les vers se fondent dans l'aquarelle, se transforment en branchage, tronc, racine, le langage respire, s'aère.
Nous tournons et retournons le livre, ronde entre nos mains, et découvrons dans l'arbre miroir une vie de partage.
Comme beaucoup d'ouvrages de poésie. il est édité en peu d'exemplaires. Dépêchez-vous.
Bénédicte LEFEUVRE
Médiathèque départementale du Pas-de-calais