CRITIQUES

Ce beau livre a obtenu le Prix de la Meilleure Création au festival de Soultz, 2004. Il réunit des poèmes de Jean Chatard écrits d'après des dessins de Claudine Goux. Ce n'est pas la première fois que ces deux complices travaillent ensemble. On connaît l'oeuvre de Claudine Goux, artiste dont l'imagination débordante ne cède jamais à la facilité et qui invente inlassablement des personnages, sondant une infinité de formes et d'êtres.
Dans Chatard, il y a chat. Il y a surtout art. Chatard sait l'art de nous empoigner et de nous révéler un mystère enfoui sous les apparences. Il est chez lui partout et, comme un chat, il voit dans l'obscurité la douleur poivrée qui luit, les carènes bleues des songes , l'os des oublis nécessaires. Il sait se jouer de l'exil pour mieux investir la déchirure d'autres lieux, d'autres dieux.
Maintes pages évoquent la musique. Et l'on sent bien que Chatard s'est reconnu dans ce jeu de personnages où chacun porte son loup.
Quelque chose de libre, de naïf, de dégagé entraîne le lecteur d'une évocation à l'autre, heureux de l'instant neuf qui prévaut.
Chatard, sur son voilier poème, tire un filet dans lequel se prend le silence / anonyme de ses nuits murmurées. Avec lui, le lecteur voyage avec bonheur, cueillant des mûres dans le panier des alizés .
Un grand coup de chapeau à l'éditeur, maître d'un si bel ouvrage...
Béatrice Libert - L'arbre à paroles

L'originalité de ce petit livre c'est qu'il part non du texte mais des dessins de Claudine Goux sur lesquels a écrit Jean Chatard. Un bel hommage au talent de C. Goux qui s'apparente à l'art brut (un petit air de Dubuffet, de Chaissac...) : On se frotte aux tisons, on est fraternel et repu. Des souvenirs s'étendent sur la nuit comme de vieux draps usés dont on ne peut se défaire. On repeint des journées à la couleur des beaux instants de la jeunesse, de la joie qui s'habille de neuf. Un accord musical texte/illustration avec le flûtiste, le violoncelliste, le claveciniste. Deux doubles pages sur un fpond noir qui fait ressortir dessins et textes. Un bel objet livre.
Odile Bonneel, Inter CDI

 Attention ! Oeuvres d'art à ne pas écorner, à ne pas déflorer, surtout ne pas tricher avec les mots, ne pas risquer de ternir l'azur, de tronquer l'espace ou d'altérer le frisson. Ne pas troubler les artistes invités à la représentation. Oeuvre plurielle : texte de Jean Chatard, d'après les dessins de Claudine Goux. Gauche/droite, l'oeil est sollicité, harmonie de la présentation, musique des poèmes, attirance envers des personnages au faciès interrogatif, le regard blanc - souvent des musiciens - ou encore mais "Mystère sous les lampions/Chacun porte son loup... ". On pourrait évoquer Picasso, Miro, mais non, Claudine Goux peut revendiquer sa propre facture. "Pour le plaisir des hirondelles", tel est le titre. On ne triche pas avec ces mots-là, leur seule évocation est aérienne et jubilatoire. "Parfois penchée elle tutoie le paysage/où l'ombre perd son nid où/la mer fait naufrage" ou encore "Se donner à l'amour sous la toge du lys".
Remercions les éditions Soc et Foc pour ce très bel ouvrage en papier glacé (15/18) comme un bonheur que l'on reçoit, que l'on veut garder pour soi et partager tout à la fois.
Jacqueline BREGEAULT-TARIEL

Dans cette superbe plaquette, le poète Jean Chatard écrit sur les vignettes du peintre Claudine Goux, où le motif reçoit les déformations poétiques, colorées et chaleureuses du cubisme ou de l'art brut. On pense à Picasso, à Klee et à Gaston Chaissac qui a naturellement sa place dans le panthéon vendéen.
Remarquable duo. Textes et dessins entrent dans un jeu de captivants miroirs, comme Violon et flûte, titre d'un des seize poèmes ainsi illustrés, où Le poumon s'organise et la main / caresse en soupirant / l'échine des rivières . Nulle soumission, cependant. À chacun sa rhapsodie. Celle de Jean Chatard, talentueuse, inspirée, a la couleur de l'ancolie ou du jasmin, elle suit la folie du temps qui court, elle est attentive aux doux murmures des nuits ordinaires, elle se pare d'exil et de frisson, elle ne déteste pas d'avancer masquée d'un loup dans l'attente de l'aube. Elle sait que toute calligraphie joue sur une poétique des signes et des marges, enfin qu'il faut à chacun sa part de tendresse humaine pour oublier que tout est provisoire et qu'il faudra se séparer, la fête terminée.
J.-P.G. Poésie Première