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LE TEMPS EN MIETTES
texte de Chantal COULIOU illustré par DAR'JAC
Au pays de la vieillesse
les corps se défont
dans le secret des jours
s'enfonçant un peu plus
dans l'austère pays de l'âge.
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CRITIQUES
Le temps est une quête perdue à l’avance, avant même d’avoir commencé, mais elle nourrit passionnément les poètes qui rêvent pour les autres et savent transmettre, l’espace d’une lecture, les secrets qu’ils ont découvert sur le monde et sur eux-mêmes, ce qui, au bout du compte, est sans doute la même chose. Médiation d’une errance, celle au hasard de la vie qui s’écoule, et qui nous laisse, finalement, que « le temps en miettes ». Souvenirs, lyrisme et sentences distillés par Chantal Couliou et que prolongent joliment les peintures de Dar’Jac.
Alain Perrocheau in Lire en Vendée N°32 avril 2018
Cette mince plaquette remarquablement réalisée par les éditions Soc et Foc renferme de précieux poèmes dans un bel écrin qu’accompagnent les peintures de Dar’Jac. Chantal Couliou y rassemble de courts textes, fragments épars d’un temps émietté, afin de célébrer la tendre sagesse d’une grand-mère qui est gagnée peu à peu par l’oubli. Cette angoisse, à laquelle la petite-fille doit résister, ne cesse de grandir au fil du temps.
Cette belle grand-mère est bien celle dont tout le monde rêve, celle qui lutte contre les rhumatismes, la fatigue et les trous de mémoire sans jamais se plaindre. « Elle déploiera ses souvenirs / en un accordéon de mots » en avançant « pour sauver un brin / de légèreté et d’insouciance », en se vêtant d’une « écharpe de petits riens / qui l’aide / à passer le gué du désespoir ».
Ces souvenirs, souvent mal arrimés, sont comme un lourd chargement qui menace de sombrer dans l’océan du grand oubli, car « le temps a gommé sa mémoire » et que l’on sait « qu’un jour / il faut se résigner / à tout quitter ». Malgré tout, dans chacun de ses poèmes, Chantal Couliou convoque l’espoir et la joie, cette « joie dans les cœurs / pour cautériser / les fêlures de la vie » puisqu’elle le rappelle, « à chaque printemps / tout recommence : / la vie reprend ses droits ».
Georges Cathalo in Texture n°40
Avec le temps qui passe, la vie se délite. Comme un miroir brisé dont les morceaux ne parviendraient plus à restituer l’image d’une existence. Il en reste des bribes, des traces, avec lesquels on tente de reconstituer le puzzle d’une vie.
Vieillir. C’est le lot de chacune et de chacun. On le sait. Mais cela ne va pas sans déchirements, sans souffrances, sans inquiétude. Pour qui vieillit sans doute, mais plus encore pour qui accompagne. La grand-mère devient l’enfant de ses enfants qui ont pour elle l’attention fébrile que l’on a pour un tout petit.
Le quotidien que l’on partage, c’est celui du corps qui brinquebale. C’est aussi celui des souvenirs que l’on rassemble, que l’on traque parfois (et aussi que l’on oublie), que l’on garde comme le lieu ultime du partage, comme demeure assumée de l’enfance, printemps toujours à recommencer.
Alain Boudet-La Toile de l'UN. décembre 2017.
La poésie, dit souvent Alain Freixe, est affaire de perte. Le temps qui passe signe toutes nos pertes. C’est de cela dont s’empare ce livre de Chantal Couliou. Un livre à plusieurs voix. Celle d’une grand-mère qui se voit vieillir. Celle de l’enfant qui la voit vieillir et qui se rend plus ou moins compte que lui aussi vieillit. Celle du petit enfant qui n’a que le bonheur encore pour horizon, un horizon dont il est le centre et le soleil.
Et quand il devient impossible de colmater les brèches on démantèle… La perte avec toutes ses étapes, jusqu’à la mémoire enfuie…
Pas de pathos, juste de la tendresse et de la justesse.
Un livre plein de gravité, d’amour et paisible finalement.
Patrick Joquel in Radio Grand Ciel
Il est un temps où « les corps se défont » où tout se défigure et se perd. Que reste t-il à cette grand-mère qui, « le regard vague » ne reconnait plus ses proches ? « Le pays de l’absence est sa nouvelle demeure ». Les enfants deviennent des parents, avec « la peur au ventre »,la peur qu’aurait une mère pour son enfant. Dans les poèmes du recueil « à cloche pied »* , le vent caracolait, chatouillait les narines. Ici, « les pas discordants » et lourds du vent gomment de plus en plus « les lignes directrices » des jours. Après avoir sauté à pieds joints dans le désespoir, ne faut-il pas tricoter les mailles de petits riens qui redonnent un sens à l’univers ? Ainsi ne pas oublier « les baisers framboise /les nuits de pleine lune/l’insolence du soleil ». A ce qui se délabre, opposer « la douceur/de la parole échangée. » « Emprunter « des sentes de traverse/ pour cueillir la beauté nichée dans l’infiniment petit. » Après avoir traversé les méandres de la douleur, de la révolte, un souffle de sagesse permet de garder « la joie dans les cœurs/pour cautériser/ les fêlures de la vie-une force essentielle-»
Dans ce chemin commun à tous, avec un temps qui, « sans notre consentement/ ronge nos corps-à petit feu- », pour que se rassemblent les miettes, Chantal Couliou tire les fils de sa mémoire, de notre mémoire L’enfance en nous ne serait-elle pas juste un peu assoupie ? Ne renaissons-nous pas à chaque printemps ?
Les belles peintures de Dar’Jac entrent en résonance avec les brisures de la vie. Mais domine le bleu des moments de grâce.
Jacqueline Persini in Poésie Première
* A cloche pied, poèmes de Chantal Couliou, photographies de Magali Lambert, Tertium éditons.
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Écrivain : Chantal COULIOU
Chantal COULIOU est née à Vannes en 1961. Professeur des écoles à Brest.
Membre de la Charte des Auteurs et Illustrateurs pour la jeunesse.
Recueils :
Poésie
Rapa Nui, éditions Rafaël de Surtis, 2012
Le vieux vélo de Jules, haïkus, éditions La Renarde Rouge, 2010
À cloche pied, Tertium éditions, 2009
Géographie de l’eau, éditions Corps Puce, 2009
Le soleil est dans la lune, éditions Corps Puce, 2008
Pour apprivoiser le vent, S’éditions, 2008
à fleur de silence ( haïkus), 2007, SOC & FOC
Carnets de petits bleus à l'âme, 2004, Les carnets du Dessert de Lune
L'avancée des jours, 2004, Éclats d'encre
Point d'attache, 2003, Gros textes
Saint-Denis, fenêtres ouvertes/ en collaboration avec le photographe Pierre Douzenel, 2003, PSD
Jours de pluie ( jeunesse), 2003, Club zéro
Lettres à Yvan,2003, La Porte
Il y a des jours, 2001, Fer de Chances
Des chemins de silence, 2000, Blanc Silex
Petits bonheurs ( jeunesse) Le Dé...
| | Illustrateur : DAR'JAC
Artiste plasticien, professeur d'art plastique et des sciences de l'art, Dar'Jac a partagé son temps entre création et enseignement sur Paris et sa région jusqu'en juin 2002. Depuis cette date, il est installé en Vendée, dans le petit village de la Gachère, à Brem sur Mer.
http://www.darjac.net
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